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Les mauvais garçons du placement

La plupart des gens ont entendu parler des placements éthiques. Mais peu savent qu’il existe au moins un fonds de placement qui fait exactement le contraire. Coup d’œil sur un concept tordu.

On trouve sur le marché une variété de fonds de placement dit éthiques. Ces fonds s’inscrivent dans la philosophie de l’investissement responsable et concentrent leurs investissements dans des entreprises qui présentent un bon bilan social : on parle ici d’environnement, de respect des droits de l’homme et d’autres valeurs tout aussi fondamentales.

Or… il fallait bien que ça arrive. En réponse à cette tendance, des gestionnaires américains ont monté un fonds qui, lui, investit systématiquement dans des compagnies dont le bilan social est, aux yeux de plusieurs, douteux. Cela s’appelle… le Vice Fund.

Gestionnaires sans scrupule

Le bien-nommé Vice Fund (qui n’est pas disponible au Canada) relève davantage de la curiosité que du véritable instrument de placement. Ce fonds investit dans des sociétés du secteur de la défense, dans les casinos et fabricants de machines à sous, dans les compagnies de tabac, les brasseurs, les distillateurs et les autres producteurs d’alcool.

Bien sûr, on trouve ces mêmes placements dans une panoplie d’autres fonds. Mais il semble que le Vice Fund soit le seul à investir uniquement dans ceux-ci. Bref, tous les mauvais garçons sous le même toit.

Est-ce que le vice paie ?

Reste maintenant à savoir si une telle effronterie paie vraiment. Depuis sa création, en 2003, le Vice Fund a enregistré un rendement annuel moyen de 22 %. En 2007, année pourtant difficile en bourse, il a engrangé pas moins de 17 %. Une personne qui a investi 10 000 $ dans ce fonds en 2003 se retrouve avec plus de 25 000 $ aujourd’hui. Mais si elle a investi plutôt selon l’indice S&P 500, elle se retrouve avec moins de 20 000 $.

Le vice, plus rentable que la vertu ?

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im                Vice Fund
im                Indice S&P 500
im                Catégorie des fonds d’actions à large capitalisation

 

En fait, le Vice n’est pas le seul à jouer cette carte. Le Free Enterprise Action Fund, lui, s’oppose au placement responsable en forçant les entreprises, par des résolutions, à justifier leur utilisation de l’argent des actionnaires à des fins éthiques (comme la lutte au réchauffement climatique). Il existe aussi un fonds fictif créé en 2002, le Clark’s Unethical Fund. Si ce fonds existait vraiment, il aurait battu le S&P 500 par 143 % au cours des cinq dernières années.

Ces chiffres sont évidemment très trompeurs : on compare des fonds à vocation ciblée à un indice diversifié. Or, tout fonds concentré a tendance à produire des résultats qui s’éloignent des indices globaux – en positif comme en négatif ! En outre, que les défenseurs de l’investissement responsable se consolent : depuis le début de l’année, presque toutes les compagnies qui se retrouvent dans le Vice sont en chute, et le fonds a perdu 5 % de sa valeur. Il y a une justice pour les mauvais garçons.

Enfin, parfois.