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Relancez l’économie maintenant. Payez en 2011.

Adieu la belle vie ! C’est un peu le message à retenir du budget déposé par la ministre des Finances du Québec, jeudi dernier. Aussi bien s’y faire, car la facture qui nous attend en 2011 sera salée.

Tout compte fait, l’ère des budgets équilibrés n’aura duré qu’une dizaine d’années, et celle des réductions d’impôt, encore moins. En déposant son budget 2009-2010, Mme Monique Jérôme-Forget a annoncé que les quatre prochaines années seront déficitaires pour le gouvernement du Québec. Selon plusieurs analystes, ces quatre ans pourraient devenir cinq, six et même davantage si les hypothèses de la ministre ne se réalisent pas complètement. On parle même d’un déficit non pas conjoncturel, mais structurel…

On a déjà connu des mois de mars plus rigolos.

Plus grand-chose à attendre de l’État

Pour chacun de nous, la première conclusion à tirer de ce budget de crise, c’est que les familles québécoises ne pourront plus compter sur l’État pour augmenter leur revenu disponible dans les prochaines années. Au cours des années 2000, les réductions d’impôt successives tant au provincial qu’au fédéral, sans parler de la réduction de 2 % de la TPS, avaient permis aux ménages de voir leur revenu net augmenter sensiblement. A posteriori, ces années d’impôts à la baisse, d’inflation modérée et de taux d’intérêt raisonnables nous apparaîtront bientôt comme un temps béni, même si on ne le réalisait pas nécessairement sur le coup. Il nous reste encore 2009 et 2010 pour souffler, mais il faut dès maintenant nous préparer à 2011.

Que se passera-t-il en 2011 ?

En 2011, escomptant que l’économie aura entamé son redressement et que les contribuables seront dans une position moins précaire, le gouvernement commencera à refiler à ces derniers le fardeau de ses déficits. Cela se fera par deux principaux moyens :

  • une augmentation d’un point de la TVQ ;
  • l’indexation de certains services gouvernementaux (permis de conduire, actes de naissance, etc.) au coût de la vie.

Le gouvernement prévoit que l’augmentation de la TVQ lui procurera environ 1,2 milliard $ de revenus additionnels. Cependant, selon ses calculs, c’est près de 4 milliards $ qu’il devra trouver pour commencer à éponger son déficit. En fait, le gouvernement estime que les dispositifs qu’il envisage lui permettront d’aller chercher environ 40 % de la somme requise. Reste à trouver la source des 60 % restants.

On parie sur des hausses d’impôt et des augmentations de tarifs plus étendues ?

En attendant

Nous avons quand même quelques bonnes nouvelles à nous mettre sous la dent. Par exemple, le crédit d’impôt pour frais de garde est ajusté pour permettre à plus de familles d’en tirer avantage. De même, les parents qui reçoivent des prestations du régime d’assurance parentale auront désormais droit au crédit. Les règles du REEE sont également assouplies et, finalement, le crédit d’impôt remboursable pour la TVQ sera haussé (mais à partir de 2011 seulement). Enfin, diverses mesures sont harmonisées avec le dernier budget fédéral, notamment celles sur la déductibilité des pertes enregistrées dans un REER ou un FERR après le décès.

Autre chose pour les particuliers ? Pas vraiment.

Aux entreprises de saisir la balle

En revanche, le gouvernement déploie une panoplie de mesures à l’intention des entreprises, principalement les PME, en espérant que celles-ci prendront le relais pour relancer l’économie. Parmi ces mesures :

  • la résurrection du REA, qui permettra aux contribuables de déduire 150 % (100 % après 2009) de leur investissement dans une entreprise cotée en bourse et dotée d’un actif inférieur à 200 millions $ ; cet avantage fiscal amènera-t-il les particuliers à canaliser leur épargne vers nos PME ?
  • une bonification des crédits d’impôt liés à l’achat d’actions de Fondaction (CSN) et un élargissement des investissements admissibles du Fonds de solidarité (FTQ) ; ces deux fonds investissent dans le développement des entreprises québécoises ;
  • l’augmentation à 500 000 $ du plafond donnant droit au taux d’imposition réduit des petites entreprises ;
  • la bonification du taux d’amortissement accéléré pour les ordinateurs, logiciels et certains autres équipements ;
  • l’extension à de nouveaux secteurs des crédits d’impôt pour la formation et pour le développement des affaires électroniques ;
  • l’instauration d’un congé d’impôt pour certaines entreprises liées à la recherche et au développement.

L’espoir est au sud

Plusieurs analystes estiment que ces mesures ne constituent pas véritablement un plan de relance. Peut-être est-ce parce qu’une fois assumée l’augmentation naturelle des coûts liés à la santé et à l’éducation, et une fois absorbée la baisse des revenus fiscaux en provenance des entreprises et des particuliers (2,5 milliards $, ce n’est pas rien), il ne reste pas beaucoup de marge de manœuvre au Québec pour investir dans de « grands projets du XXIe siècle » comme le font les États-Unis.

À moins d’augmenter massivement le fardeau fiscal des Québécois (au risque d’aggraver la situation), il reste donc au gouvernement québécois à espérer que le plan de relance américain portera fruit et, par ricochet, injectera de l’adrénaline dans notre propre économie.