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Fiducies de revenu : quelle leçon retenir?

Récemment, le ministre des Finances Jim Flaherty a mis fin de façon brutale aux avantages dont bénéficiaient les fiducies de revenu. Et maintenant ?

La nouvelle a pris tout le monde par surprise. Communiquée après la fermeture des marchés, le 31 octobre, elle a entraîné le secteur des fiducies de revenu dans une vrille qui allait faire perdre à plusieurs titres, dès le lendemain matin, près de 40 % de leur valeur. À la fin de la semaine, après quelques soubresauts, l’indice des fiducies de revenu du TSX clôturait en baisse de 14 %.

On a beaucoup argumenté sur cette décision, en termes de finances publiques et de fiscalité des entreprises. Pour le petit investisseur, qui a vu son placement fondre d’un coup, les enseignements sont cependant beaucoup plus simples.

Tout placement comporte un risque

À la base, il convient de regarder le phénomène pour ce qu’il est : l’éclatement d’une autre bulle. Que cet éclatement ait été provoqué par une décision gouvernementale n’y change rien : trop d’investisseurs, trop de petits investisseurs, se sont précipités vers un placement qu’ils trouvaient attrayant sans en comprendre les risques.

Qui ira le leur reprocher ? Après l’éclatement de la bulle boursière du début des années 2000, les marchés financiers leur ont infligé plusieurs années de rendements négatifs, alors même que les taux d’intérêt étaient au plus bas. Avec leurs rendements dépassant souvent les 10 %, les fiducies de revenus sont vite apparues comme une solution miracle.

Seulement, en finance, il n’y a jamais de miracle. Et c’est une grave erreur d’oublier la règle de base de l’investissement : plus de rendement potentiel signifie toujours plus de risque. Toujours.

Faire ses devoirs

D’ailleurs, le secteur des fiducies de revenu n’a pas toujours eu besoin des gouvernements pour soumettre les investisseurs à des petites crises de son cru. À la fin des années 1990, par exemple, dans une conjoncture particulièrement difficile (taux d’intérêt à la hausse, crise économique en Asie, etc.), plusieurs fiducies de revenu avaient vu leur valeur chuter de 40 %. À condition de faire ses devoirs, tout investisseur aurait dû savoir qu’une fiducie de revenu pouvait aussi être un placement très volatil.

Lire entre les lignes

Dans le cas présent, les termes ont pu constituer un miroir aux alouettes. « Fiducie » et « revenu » ont une aura de sécurité. Malheureusement, les mots sont souvent trompeurs et ils ont pu faire oublier que ni la valeur, ni le rendement, ni la composition des revenus versés à l’investisseur par une fiducie de revenu ne sont garantis.

À cet égard, les fiducies de revenu s’apparentent bien davantage à un investissement dans des actions qu’à des titres à revenu fixe. Réalité que la décision du ministre Flaherty est venue rappeler brutalement.

Ne pas acheter si la compréhension n'y est pas

Un autre élément a contribué à la popularité des fiducies de revenu : leur traitement fiscal pour le particulier. En versant des distributions qui étaient souvent un amalgame de revenu et de remboursement, à l’investisseur, de son propre capital, les fiducies ont nourri l’illusion que leur rendement était moins fortement imposé dans les mains du particulier. Un placement qui rapporte du 15 %, alors que la Bourse est déprimée et que les taux d’intérêt sont à 2 % – et qui, en plus, n’est que partiellement imposé ? N’était-ce pas trop beau pour être vrai ?

En fait, derrière les fiducies de revenu se cache une ingénierie financière dont la complexité échappe à la grande majorité des petits investisseurs. Ce que nous venons de vivre ne fait que rappeler le bien-fondé du mot d’ordre de Warren Buffet, qui est pourtant l’un des plus éminents financiers au monde : quand vous ne comprenez pas le placement que vous vous apprêtez à acheter, alors ne l’achetez pas.